Mis à jour le 25 janvier 2022 • Écrit par Infocession

Témoignage cession d'entreprise :
Plus qu'un repreneur, un partenaire

Perrine Puberl

Directrice Générale d' Euridis Business School
Perrine Puberl - Euridis Business School
Secteur d'activité :
Services & Biens de consommation
Chiffre d'affaires à la cession :
8 M€
Année de l'opération :
2019

Perrine Puberl, jeune entrepreneuse de 34 ans, a largement contribué à la croissance d’Euridis Business School, école de commerce spécialisée dans la formation des étudiants à la vente et à la négociation commerciale BtoB dans le secteur des Hautes Technologies. Arrivée en 2011 au sein de la structure en tant que chargée de recrutement et communication, elle rentre au capital en 2016 avec pour mission de continuer à faire croître l’école en s’attaquant aux enjeux de visibilité, de communication, de marketing et à la création de nouvelles antennes.

Quelques années plus tard et avec un chiffre d’affaires multiplié par 8, pour des raisons extra professionnelles ses deux associés font part de leur souhait de quitter le navire. Perrine décide de réinvestir au sein d’Euridis, et se met à la recherche du repreneur idéal pour l’épauler dans cette nouvelle croisière en solitaire à la tête de l’entreprise. 

Elle nous livre ses ressentis sur son processus de cession, ainsi que ses conseils pour faire de cette épreuve une réussite.

Quelles ont été les raisons qui ont motivé cette opération de cession ?

Dans certains cas, les cessions d’entreprises sont motivées par des raisons stratégiques, par la nécessité d’obtenir des fonds supplémentaires pour financer de nouveaux projets. Concernant la transmission d’Euridis, ça n’a pas été le levier principal. La vente s’est un peu imposée à moi, dans la mesure où mes deux associés désiraient se séparer et vendre leurs parts, et que je ne disposais clairement pas des capacités financières pour racheter la totalité du groupe. 

Euridis étant comme mon bébé, j’ai mis toutes mes tripes dans le développement de cette école et il n’était absolument pas question que je quitte l’aventure tout de suite.

À partir du moment où, seule, je ne pouvais pas racheter les parts de mes deux des associés, il nous est apparu nécessaire de nous adosser à un groupe.

C’est aussi un moyen pour moi d’être épaulée car à 34 ans, gérer un groupe qui fait plusieurs millions d’euros de chiffre d’affaires, ce n’est pas forcément évident. J’avais besoin d’être entourée de jeunes personnes dynamiques, entreprenantes et qui puissent m’accompagner dans le pilotage d’Euridis Business School. 

Quelles étaient vos craintes et vos attentes quant à votre projet de reprise ? 

Étant relativement jeune pour un projet de cette envergure, il était essentiel de m’assurer du soutien de mon repreneur sur la gestion de sujets sur lesquels je ne suis pas forcément experte, tels que le cadre règlementaire ou bien sur la gestion financière de l’entreprise. 

J’attendais aussi de mon futur partenaire qu’il m’accorde suffisamment d’autonomie et de marge de manœuvre pour continuer à diriger Euridis, tout en préservant les facteurs clés de son succès.

Le faible nombre d’étudiants par classe, notre spécialisation dans un secteur de niche et d’avenir, la qualité de nos formateurs et du corps enseignant, notre business model… Ce sont autant de spécificités qui ont fait la force d’Euridis et que je souhaitais voir perdurer. 

Enfin, lorsqu’on se fait racheter, on partage souvent cette crainte légitime de voir ses salariés licenciés, surtout ceux occupant des fonctions transverses. J’ai donc pris la peine de m’assurer que mes conditions seraient bien respectées.

Quel est en pratique la relation que vous avez désormais avec votre repreneur, le groupe Eureka Education ? 

Je pense avoir fait le bon choix en m’adossant au groupe Eureka, car ce sont des managers jeunes, dynamiques, entrepreneurs, qui nous font confiance et qui nous donnent carte blanche pour la gestion du fonctionnement de l’entreprise. Je leur demande leur avis quand j’en ai besoin, et lorsque ce n’est pas le cas, j’avance et ils m’encouragent à foncer.

C’est vrai que les a priori que j’avais par rapport au rachat ont disparu.

Certes, je dois rendre quelques tableaux financiers et quelques chiffres clés, mais dans le fonctionnement global de l’école, ça n’a absolument rien changé pour les équipes. Eureka nous permet de nous développer plus vite, ils sont à l’écoute et force de proposition en cas de besoin, et même prêts à terme à nous soutenir dans des projets de croissance externe. 

Avec ce soutien là on ne se donne plus forcément de limites dans la vitesse de croisière, tout en gardant la qualité et le positionnement qui font notre marque. Je suis donc ravie de cette collaboration, qui n’aurait probablement pas été permise sans le concours de notre banque d’affaires. 

A ce sujet, quel a été l’apport de votre banque d’affaires au cours de votre projet de cession ? 

Mes anciens associés et moi avons effectivement eu recours à une banque d’affaires pour la vente, qui a monté tout un dossier sur l’école afin de la présenter à différents groupes. On leur a donné notre cahier des charges sur l’acquéreur type que l’on souhaitait, et celui que l’on ne souhaitait pas. Ensuite ils se sont mis pour nous à la recherche de groupes qui pourraient correspondre à notre périmètre. 

Nous avons été mis en relation par le biais d’un contact, qui avait connaissance d’une banque d’affaires spécialisée dans le secteur de l’éducation. En effet, il s’agit d’un acteur qui dispose d’une branche dédiée à ce secteur. Sans eux, nous n’aurions probablement jamais rencontré Eureka, leader sur le marché de la formation en esthétique et en coiffure, qui souhaitait s’étendre à d’autres verticales métiers. Ces acteurs sont extrêmement difficiles à identifier, comme tout groupe en construction, d’autant plus sur ces segments de niche. 

C’est là le point fort des banques d’affaires : leur réseau.

La nôtre connaissait tous les dirigeants de toutes les écoles. Sur les potentiels repreneurs ciblés, nous en avons sollicité trois, puis gardé celle qui nous semblait la plus pertinente à la fin.

Quelle a été votre démarche pour définir la structuration fiscale de l’opération ? 

J’ai fait appel à un avocat fiscaliste. Certes, cela représente un coût, mais étant donné qu’il m’a permis de gagner de l’argent, j’en suis très satisfaite. 

Je n’étais absolument pas sensibilisée à toutes ces notions. Sans ses conseils, j’aurais naturellement perçu et réinvesti le produit de cession à partir de mon compte bancaire personnel, et donc perdu 30% de flat tax sur mes gains. Il m’a également présenté des procédés complexes de réduction de capital, de versement de dividendes, de création de holding…

Franchement ce n’est pas si simple, c’est un véritable métier, et chacun son métier !

Je n’avais ni le temps, ni l’envie de m’intéresser à ces mécanismes. Je vous recommande donc de faire appel à des professionnels de confiance, sur lesquels vous pouvez vous reposer afin de vous concentrer sereinement sur l’opérationnel. 

Auriez-vous quelques conseils à donner à des dirigeants qui souhaiteraient transmettre leur entreprise ? 

Tout d’abord, choisir avec attention le groupe avec lequel on veut s’adosser. Je pense qu’il faut baser son choix à la fois sur l’adéquation avec les valeurs de son entreprise, ce que l’on souhaite conserver, sur la perception du développement futur de l’entreprise et sur la stratégie à poursuivre… C’est un peu semblable aux discussions que l’on pourrait avoir avant de se marier avec quelqu’un, on ne se marie pas sur un coup de tête ! Et je pense qu’on ne consacre pas assez de temps à challenger ces sujets, mais plus à parler d’enjeux financiers et techniques que je considère comme secondaires. 

Ensuite, ne pas avoir peur d’imposer ses conditions, même lorsque l’on devient minoritaire. 

Être minoritaire ça ne signifie pas ne décider de rien, bien au contraire.

On peut tout à fait être en mesure soumettre ses exigences, de prendre des décisions, et de ne s’engager qu’à la condition que ses volontés soient écoutées et respectées. Moi, je leur ai carrément fait une liste de tout ce que je ne voulais pas voir changer et de tout ce que je souhaitais développer, sur le plan qualitatif et quantitatif. J’ai aussi imposé ma vision des valeurs et usages d’Euridis que je souhaitais pérenniser.

Enfin, ne surtout pas s’engager dans un processus de cession sans conseils, au risque de détériorer vos relations avec vos associés ou avec vos investisseurs.

A titre d’exemple, l’associé fondateur a souhaité vendre la majorité des parts d’Euridis quelques années avant la vente aux deux autres associés dont je faisais partie. Nous n’avions pas encore pris d’avocats lorsque nous avons entamé les négociations sur le prix de cession. Résultat, les relations entre mes deux associés se sont tendues et cela a fortement impacté la suite de leur collaboration. Vos conseils vous épargnent justement ce genre de conflits pouvant survenir au cours des négociations. 

Ils parviennent également à identifier les sujets importants et ceux qui sont secondaires, ce sont de véritables spécialistes dans leurs domaines. Demain, si je mets n’importe quelle personne inexpérimentée à la tête de mon école, il va avoir du mal à la gérer. Pour la cession c’est pareil. Négocier un pacte d’actionnaire, une clause de garantie de passif, gérer les sujets fiscaux, négocier un prix… la cession implique des sujets très complexes et, lorsqu’on est novices, il vaut mieux les laisser à des professionnels.


CONSEILS CLÉS

  • Choisir un repreneur en adéquation avec les valeurs de son entreprise et le projet envisagé

  • S'entourer d'une banque d'affaires pour cibler les repreneurs adaptés

  • Faire appel à un avocat fiscaliste en amont pour structurer son opération de cession

  • Définir et imposer ses conditions de reprise, même en tant que minoritaire